À quarante-quatre ans, Piero est inapte au travail, parce que malheureux. Au village, il est « Repacho », le disjoncté qui parle bizarrement. Piero ne ferait de mal à personne, pas même à une mouche, il lutte seulement contre les tracas du quotidien : les disputes continuelles avec son épouse Bella ; les fréquents heurts avec les autres villageois, toujours prêts à se moquer de lui ; le trouble provoqué par les belles Milanaises en vacances. Bref, le temps passe entre une foultitude d’obsessions et une mélancolie incontrôlable. Mais le plus fabuleux, c’est ce qui se passe dans sa tête, où il fait et refait le monde avec un langage bariolé et des mots qui se suivent à l’infini… Jusqu’à arriver, comme dans une spirale infernale, au cœur du problème, ce par quoi tout est arrivé : la mère. Piero rêve de revanche sur la vie, laquelle prend les traits d’une fuite vers le nord du pays, un endroit mythique où tous ses problèmes seraient enfin réglés. Mais en attendant, ici, dans ce village de culs-bénits, celui que tout le monde appelle Repacho ourdit sa petite vengeance : le jour de Noël, qui est le plus triste de l’année pour lui, il décide de dérober la crèche de l’église. Un récit tragi-comique raconté à la première personne sous la forme d’un long monologue, où les ombres du passé viennent se mêler à la gaucherie touchante d’une aventure inclassable.
Comme il est difficile de parler de ce roman!
Nous sommes en effet sur un format court, un long monologue de Piero.
Piero, 44 ans, surnommé Repacho (prononcer « repas chaud »), n’entre pas dans les cases. Piero est un homme éminemment vulnérable. Il est fragile et dans une situation précaire. Il est en décalage avec l’ensemble de son environnement.
Piero se sent désoeuvré et profondément triste. Le malheur est son quotidien. Il ressent une souffrance psychologique intense.
Piero est invalide. Il n’est pas capable de fixer son attention. Il passe d’une lubie à l’autre, est obnubilé par chacune, lutte obsessionnellement contre tout et tous, fantasme une fuite impossible de la misère dans laquelle il survit. Son quotidien est oppressant, il le ressent violemment. Il a besoin de reconnaissance et de vengeance. Comme il dit : « Il est grand dehors mais petit dedans ».
La première obsession de Piero est de se venger des autres villageois qui lui pourrissent la vie depuis toujours. Alors il a décidé de voler la crèche de l’église.
Son quotidien est un carcan dans lequel il est enfermé et auquel il voudrait échapper, mais sans pour autant y parvenir. C’est sa seconde obsession : partir au nord vivre une autre vie, profiter de la plage et séduire les Milanaises de Milan, ou même Blondinette, à défaut. Parce qu’il ne supporte plus Bella, sa femme. Parce qu’il ne supporte plus non plus la vie avec ses parents : sa mère qui l’a détruit, son père qui a toujours été d’une indifférence crasse et préférait courir les jupons que de s’occuper des siens.
Piero vit dans une solitude profonde et souffre d’une dépression sévère. Il végète dans ce marasme dont il est incapable de s’extraire. Sa vie a toujours été empreinte d’une grand misère : sociale, pécuniaire, sentimentale. Sa seule chance de s’enfuir de là reposait sur son frère Santino qui a réussi à quitter le village, lui, mais qui est décédé suite à une chute dans un ravin. Alors, il ne lui reste plus rien, à Piero. Rien que sa rancoeur, sa colère et sa détresse.
Le style est très familier, c’est écrit comme pense Piero.
L’histoire de Piero est pétrie d’une grande injustice, d’une souffrance colossale, d’une affliction abyssale. C’est le récit d’une lente agonie. Les thèmes abordés sont délicats mais évoqués avec justesse. Le sujet est compliqué mais maîtrisé.
ISBN 9782959262807. 108 pages. 17 €. Editions L’Echarpe d’Iris. Traduit de l’italien par Murielle HERVE-MORIER.
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